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Compte rendu du stage de kendo de Belfort, ou comment j'ai fait mon maximum plus un
Samedi 28 et dimanche 29 septembre se tenait à Belfort un stage de kendo animé par Claude Pruvost 7ème Dan.
Avec Éric, notre senseï, nous avons été les deux seuls braves à nous y rendre.
L'atmosphère générale était à la fois sympathique et rigoureuse dans le travail à faire.
Bien des aspects techniques, surtout les fondamentaux ont été passés en revue, pratiqués et pratiqués encore afin que le corps adopte la langue du kendo.
Les gestes les plus évidents ont été analysés, décomposés et travaillés. Dès le salut, les observations et conseils ont été prodigués.
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En seiza, se tenir le dos bien droit mais les épaules relâchées en posant les mains sur les cuisses. Le salut s'effectue normalement en posant la main gauche en premier, laissant la possibilité à la main droite de saisir le sabre en cas d'attaque surprise. Mais à l’entraînement les deux mains peuvent être posées simultanément en dessinant un losange entre les pouces et index des deux mains. En se penchant, le dos doit rester bien droit et le regard porter en face de soi et non vers le sol. On veille à ne pas décoller les fesses. Ainsi on ne s'appuie pas sur les mains lorsqu'elles touchent le sol devant soi.
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La tenue du boken ou du shinaï a également été commentée. La façon d'appliquer les mains « par le dessus » sur la tsuka pour tenir correctement son arme et non par le côté ; la force mesurée avec laquelle tenir le shinaï. Sans se crisper.
Par deux nous avons travaillé cela en tirant sur le shinaï du partenaire de sorte à ce que celui-ci s'échappe des mains en entendant le frottement délicat de la tsuka contre le cuir des kotes. On apprécie alors la force à exercer : ni crispation qui bloque le shinaï (et donc la souplesse des bras et des épaules dans l'exécution des mouvements), ni relâchement qui laisse filer sans résistance (et qui conduit donc à un manque de présence et d'engagement dans l'échange).
La pratique des suburis a permis de travailler le rôle de chaque geste du corps en insistant sur les épaules ou plus précisément sur l'épaule gauche, véritable « moteur » de l'armé-frappé. Pour travailler la frappe du Men, la souplesse du mouvement, la rapidité, l'importance des mains et de la force qu'elles exercent, nous avons pratiqué des exercices alternant pose sur le Men et frappe.
Dans un premier temps l'exercice consiste à exécuter Men en posant le boken sur la tête du partenaire (oui, oui, sur la tête ! Mais on se fait confiance...). Travail précis de la distance, de la souplesse du mouvement « armé-posé » et donc le contrôle de la pose.
Pour comprendre la différence entre la pose et la frappe, l'exercice suivant a consisté à s’entraîner toujours par deux sur le boken. Motodashi tient son boken à l'horizontal en présentant le plat de la lame, à hauteur du Men. Shidashi fait Men sur le boken en alternant armé-posé et armé-frappé. Lors de la frappe, les mains se resserrent sur la tsuka (« l'essorent »), ce qui transfert l'énergie du mouvement sur le point d'impact et immobilise le boken au niveau de ce point d'impact. La frappe ne se relève pas, comme sous l'effet d'un ressort, ni ne se prolonge (contrairement au Do).
Avec tout ça, on n'a travaillé que le haut. Je n'ai transpiré que quatre litres et la température dans mes épaules ne dépasse pas les deux cents degrés !
Vient donc le moment de se concentrer sur le bas. Je passe rapidement sur la tenue convenable en chudan, les épaules relâchées mais qui restent bien dans l'axe droit du dos, les coudes au corps sans être trop serrés et bien sûr : zanshin.
La première série d'exercices a veillé à nous faire travailler la synchronisation des mouvements armé-jambe droite-frappé-jambe gauche, dans un mouvement fluide et continue s'opérant en un seul temps. Éviter les ruptures entre armé puis déplacement de la jambe droite ou déplacement de la jambe droite avant l'armé, puis le déplacement de la jambe gauche ou déplacement de la jambe gauche avant le frappé. L'objectif est bien de réaliser l'ensemble dans un seul mouvement et en un seul temps.
Mais la deuxième série d'exercices nous a fait travailler l'intérêt stratégique qu'il peut y avoir à modifier l'ordre des gestes.
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Pour menacer et augmenter la pression sur le partenaire, j'avance d'abord (jambe droite) puis j'arme et je frappe.
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Pour contrer, en étant plus rapide que le partenaire (du moins en espérant l'être), j'arme d'abord (alors qu'il avance), puis j'avance et je frappe.
Ces gestes ont été travaillés seul au boken et à deux au shinaï. Il va de soi que nous avons aussi travaillé à deux, dans le même souci de contrôle de la distance, Men, Kote-Men, Kote-Men-Do. Et travailler par deux, ça je peux dire qu'on l'a fait jusqu'à épuisement. Midi est venu m'apporter une pause plus que salutaire.
Nous avons réalisé à nouveau des séries Men, Kote-Men et Kote-Men-Do en travaillant les déplacements.
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Premier type d'exercice : motodashi passe de chudan à seme en avançant. Shidashi réagit rapidement en faisant Men.
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Étape suivante : motodashi avance et arme pour faire Men, shidashi réagit en faisant Do.
Si ces exercices se sont faits en augmentant la vitesse d'exécution, l'accent a été mis sur l'identification de l'instant : repérer jusqu'à quand je peux attendre que motodashi avance en me menaçant avant que j'arme et riposte par Men. Idem pour Do : identifier le départ de l'attaque pour lancer la sienne plus rapidement.
A la fin de cette phase de travail, j'ai cherché mon portable pour que les pompiers me rapatrient aux vestiaires. Malheureusement je ne l'avais pas sur moi. Je me suis donc traîné, il serait même plus juste de dire que j'ai dégouliné jusqu'aux vestiaires et j'ai abandonné le stage pour la dernière heure qui restait à faire.
Au final il est extrêmement enrichissant de pratiquer avec d'autres kendoka. Au sein du club on se familiarise avec le gabarit, les gestes, les rythmes de chacun. Là, beaucoup de choses changent au point d'être désorientant et cela est constructif.
Les consignes et conseils du senseï sont remarquables d'évidence. J'ai remarqué que j'en mesurais davantage la portée que lors du premier stage que j'ai suivi. C'est sans doute la marque du débutant qui progresse. Mais je me demande surtout quelle est la part, dans tout ce qui a été montré et dit, qui m'échappe.
Se poser cette question est peut-être sain, j'espère qu'elle m'aidera à rester un débutant encore longtemps, qui doit trouver la voie du sabre.